Philippe Reynaert: « Belgorama, c’est un espace de liberté autour du cinéma belge »

Rencontre avec Philippe Reynaert, monsieur lunettes blanches, qui à peine l’heure de la retraite sonnée chez Wallimage, embarque dans une nouvelle aventure, en devenant ambassadeur de Belgorama, plateforme en ligne lancée cette semaine par la RTBF dans le cadre de l’opération « Tapis bleu pour le cinéma belge » organisée avec les Magritte du Cinéma. Il nous parle de cette nouvelle mission exaltante, visant à mettre en lumière le cinéma belge et ses talents. 

Bonjour Philippe, Belgorama, c’est quoi?

Pour moi, c’est comme un conte de fées! Jean-Paul Philippot m’a contacté il y a quelques semaines à peine quand la retraite est arrivée pour me demander si j’étais plutôt du genre à élever des chèvres en Dordogne, ou plutôt à rester un peu actif. Il m’a suggéré d’appeler Marc Janssen au département fiction, qui était en train de concevoir un corner Auvio dédié à la création audiovisuelle belge, à l’image du corner Colors créé il y a quelques mois.

Pour faire bref, Belgorama, c’est un endroit où les gens qui ont un intérêt et un appétit pour l’audiovisuel belge vont s’éclater.

C’est aussi une façon de remettre en valeur la mémoire du cinéma belge sur la RTBF?

Oui, l’idée est d’éditorialiser tout ce qui arrive en catch-up sur Auvio. Concrètement, avec la diffusion du film Duelles par exemple, on va également revoir la couverture presse faite par les journalistes de la RTBF à l’époque, mais aussi les deux premiers courts métrages du réalisateur Olivier Masset-Depasse, son premier long, Cages, mais aussi la capsule Cinevox consacrée au film! Plein de contenus divers et variés liés de près ou de loin au film.

Autre programmation excitante, toutes les séries produites pour la RTBF devraient être remises en ligne. Il y a tellement d’émissions qui ont été produites, c’est une vraie richesse.

Il y a aussi un énorme travail à faire avec la Sonuma, et je compte bien mettre mon casque de mineur, et allez faire un tour dans ces archives très bientôt!

Il y aura également des contenus inédits?

C’est la cerise sur le gâteau! Ces contenus originaux seront encadrés par 4 journalistes, Hadja Labib, pour le documentaire, Stanislas Ide pour les séries, Lucie Rezsöhazy pour les web créations, et moi-même pour la fiction. L’idée est qu’à chaque fois que le public revient sur Belgorama, il trouve un nouveau contenu.

On aura plusieurs types de rubriques, des interviews, des chroniques, des portraits… On a une vraie liberté, je n’aurais pas pensé pouvoir retrouver cela un jour. Du coup, je commence avec une analyse approfondie de Cages, le premier long métrage d’Olivier Masset-Depasse. On va aussi proposer des entretiens d’une vingtaine de minutes, autour des moments forts de la carrière de nos invités. Et on commence avec un autre invité de prestige, François Damiens, qui va nous parler de Mon Ket vu à travers différents prismes: les costumes, les caméras cachées, les acteurs/ piégés, etc.

« Cages » d’Olivier Masset-Depasse

Le vrai challenge finalement, c’est de retrouver un angle original autour de films sortis il y a quelques mois ou années! On réfléchit également à des interviews à distance, des débats entre des expert·es, pour réunir des personnalités autour de thématiques qui posent question aujourd’hui.

Et puis on trouvera aussi des créations inédites, par exemple le podcast Tapis Bleu, créé par Myriam Leroy, Laurence Bibot et Sébastien Ministru.

La beauté des choses, c’est vraiment la liberté dont nous jouissons. On peut se permettre de viser des publics de niche, nous ne sommes pas contraints par l’horaire de diffusion, on peut donc s’amuser, être pointus, proposer des contenus insolites… Ce qui est génial pour moi, c’est que j’ai l’impression de découvrir un tout autre aspect de la RTBF!

C’est aussi une façon pour la RTBF de contribuer via un canal dédié de promotion au rayonnement du cinéma belge, quelque chose qu’on lui reproche souvent de faire trop peu?

C’est vrai que même s’il y a encore du chemin, c’est un premier pas important pour répondre aux attentes des professionnels, dans le suivi du plan ReStart, et de l’indispensable solidarité de la RTBF vis-à-vis du monde de la culture. Aujourd’hui, il faut vraiment que le milieu et la RTBF renforcent leur partenariat, qui pourrait donner des choses magnifiques.

C’est vrai aussi c’est qu’il y a des complémentarités évidentes à créer avec Cinevox. Cinevox a la particularité de pouvoir se pencher sur l’actualité, qu’il s’agisse des sorties salles, mais aussi des tournages, quand Belgorama travaille plus dans la rétrospection. On pourrait imaginer que certains des contenus créés par Cinevox puissent se retrouver sur Belgorama, et créer un lien direct entre les salles et Auvio.

Comment voyez-vous l’avenir pour la profession, en cette période?

Je pense que le recours accru aux plateformes ces derniers mois a aussi mis en lumière la possibilité de s’adresser plus facilement, ou plus directement à des publics de niche. C’est sûr que le diktat de la comédie familiale diffusée à 21h sur TF1 a fait certains ravages. Là, on dirait que le style et les thèmes se libèrent… Aujourd’hui, si une jeune réalisatrice veut faire un film d’horreur pointu sur le cannibalisme, ça donne Grave, et il y a un vrai public. Je pense que malgré cette épouvantable crise sanitaire et ses répercussions économiques, le cinéma a de beaux jours devant lui. Je ne suis pas pessimiste, même s’il va y avoir des crash. Le cinéma ne va pas mourir.

On va peut-être enfin voir se mettre en place la théorie de la long tail, et avoir l’opportunité de redécouvrir des films trop peu vus, c’est pour ça qu’en plus de Duelles, on a choisi de mettre Cages en lumière.

Vous avez sorti un livre il y a quelques mois, consacré au Festival de Cannes…

Oui, avec un sens du timing tout particulier! On a attendu 40 ans pour sortir notre livre sur Cannes, Myriam et moi, et on l’a sorti… l’année où il n’y avait pas de Festival!

Il s’agit d’un livre de souvenirs sur cette caverne d’Ali Baba qu’était le Festival de Cannes. J’ai découvert le Festival en 1980, et très vite, je me suis dit qu’il me fallait des photos pour illustrer les interviews. J’ai convaincu ma femme, Myriam Debehault, qui faisait des photos de tableaux pour des galeries, pas vraiment le même domaine!

La chance, c’est qu’à l’époque, on travaillait dans des conditions qui étaient le contraire de celles qu’on trouve aujourd’hui avec les photocalls. Myriam faisaient ses photos pendant les interviews, et finissaient par réussir à se faire oublier. Ses portraits  exprimaient avec intensité l’intériorité des artistes. Et puis au milieu des années 80, on a commencé à généraliser les conférences de presse où on s’est mis à devoir jouer des coudes pour prendre des photos.

Ce livre, c’est donc le témoignage de quelques années dorées, où on rencontrait les grands du cinéma pour le magazine Vision, d’Antonioni à Bresson, en passant par Orson Welles…

 

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